Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/430

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guère, il est vrai, qu’un enfant, mais qui était engagé par les témoignages d’amitié et les services que son père avait reçus de Pompée, et de se jeter entre les mains des Parthes, la plus perfide de toutes les nations. « Quoi ! disait-il, Pompée refuse de s’assurer le premier rang entre les autres hommes, en se résignant à être le second après un Romain dont il a été le gendre ; il ne veut pas faire l’épreuve de la modération de César ; et il livrerait sa personne à un Arsacès[1], qui n’a pas même pu s’emparer de Crassus vivant ? Il mènerait une jeune femme du sang des Scipions au milieu de Barbares, dont le pouvoir n’a d’autre règle que leurs caprices et la satisfaction de leurs passions brutales ? Et, supposé qu’elle ne reçoive aucun outrage, n’est-ce pas assez d’indignité qu’elle soit seulement exposée au soupçon d’en avoir souffert, pour s’être trouvée aux mains d’hommes capables de tout entreprendre ? »

Ce dernier motif fut, dit-on, le seul qui détourna Pompée de prendre le chemin de l’Euphrate, si toutefois ce fut la réflexion de Pompée, et non point un mauvais génie qui lui fit prendre l’autre route. L’avis de se retirer en Égypte ayant donc prévalu, il partit de Cypre avec sa femme, sur une trirème de Séleucie : les autres personnes de sa suite montaient ou des vaisseaux longs, ou des navires marchands : la traversée fut heureuse. Informé que Ptolémée était à Péluse[2] avec ses troupes, faisant la guerre à sa sœur[3], il se mit en chemin pour s’y rendre, et se fit précéder par un de ses amis, chargé d’informer le roi de son arrivée, et de lui demander asile.

Ptolémée était extrêmement jeune ; Pothin, qui exer-

  1. Voyez la Vie de Crassus vers la fin, dans ce volume.
  2. À l’embouchure la plus orientale du Nil.
  3. Cléopâtre.