Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/531

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dans la ville des Malles, les pertes considérables que son année avait essuyées chez les Orites, en faisant désespérer qu’il échappât à tant de dangers, inspirèrent aux peuples nouvellement soumis la hardiesse de se révolter, et rendirent les gouverneurs des provinces et les satrapes infidèles, avares et insolents. Partout enfin se répandirent une agitation extrême et un esprit de nouveauté. Il n’y eut pas jusqu’à Olympias et à Cléopâtre, qui, s’étant liguées contre Antipater, partagèrent entre elles les États d’Europe : Olympias prit l’Épire, et Cléopâtre la Macédoine. Alexandre, ayant appris ce partage, dit que sa mère avait fait le choix le plus prudent, parce que les Macédoniens ne se laisseraient jamais gouverner par une femme. Ces événements l’obligèrent d’envoyer de nouveau Néarque vers la mer, et de porter la guerre dans toutes les provinces maritimes. Quant à lui, il parcourut en personne les hautes provinces, et punit les gouverneurs qui s’étaient mal conduits. Il tua de sa propre main, d’un coup de javeline, Oxyartès, un des fils d’Abulitès. Abulitès n’avait amassé aucune des provisions qui lui avaient été commandées ; mais il présenta trois mille talents[1] d’argent monnayé, qu’Alexandre fit mettre devant ses chevaux ; et, comme ils n’y touchaient pas : « Qu’ai-je affaire de tes provisions ? » dit-il ; et il jeta Abulitès en prison.

Son premier soin, en Perse, fut de distribuer aux femmes, selon la coutume des rois chaque fois qu’ils entraient dans le pays, une pièce d’or par tête : usage qui avait empêché, dit-on, plusieurs rois de venir souvent en Perse : Ochus n’y alla jamais, et, par une sordide avarice, il se bannit ainsi lui-même de sa patrie. Alexandre, ayant trouvé le tombeau de Cyrus ouvert et violé, punit de mort l’auteur de ce sacrilège, quoique ce fut un

  1. Environ dix-huit millions de francs.