Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/634

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avaient été mis en déroute à la première attaque ; pour lui, avec l’élite de ses troupes, il marche à l’ennemi. La mêlée fut très-rude : de part et d’autre, les soldats combattirent avec acharnement et sans ménager leur vie. Deux jeunes officiers, Thallus, fils de Cinéas, et Glaucus, fils de Polymède, qui combattaient à côté du général, se distinguèrent entre tous les Athéniens. Cléophanès y donna aussi de grandes preuves de valeur, et fit si bien, par ses cris et ses exhortations, que les cavaliers qui avaient pris la fuite finirent par se rallier et aller au secours de leur général qui se trouvait en danger : il les ramena au combat, et assura la victoire de l’infanterie. Profitant de ce succès, Phocion chassa d’Érétrie Plutarchus et s’empara du fort de Zarétra, situé dans un lieu très-avantageux, à l’endroit même où l’île se rétrécit le plus, resserrée des deux côtés par la mer. Phocion renvoya tous les prisonniers grecs qu’on avait faits, de peur que les orateurs athéniens n’excitassent le peuple à se porter, dans un mouvement de colère, à quelque cruauté contre eux.

Après cet exploit, Phocion quitta l’Eubée. Il ne fut pas plutôt parti que les alliés regrettèrent sa douceur et sa justice, et que les Athéniens reconnurent sa valeur et son expérience ; car Molossus, qui lui succéda dans le commandement de l’armée, se conduisit de telle sorte, qu’il fut fait prisonnier par les ennemis. Philippe, dont les espérances ne s’arrêtaient pas à de médiocres desseins, se rendit dans l’Hellespont avec toute son armée, ne doutant point de soumettre à la fois la Chersonèse[1], Périnthe[2] et Byzance[3]. Quand les Athéniens eurent décidé qu’on y enverrait du secours, les orateurs firent si bien,

  1. C’est la Chersonèse de Thrace.
  2. Dans la Thrace, sur la Propontide.
  3. Dans la Thrace, sur le Bosphore.