Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 3.djvu/733

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Caton et le grand Pompée ont pris la fuite, en lui abandonnant toute l’Italie. Nous affranchissons nos esclaves, pour les faire servir contre César ; et nous-mêmes, il ne nous reste de liberté que ce qu’il plaît à César de nous en laisser. Revenons de notre égarement ; sachons bien ce que nous sommes ; et, pendant qu’il en est temps encore, ayons recours à la clémence du vainqueur, et envoyons demander qu’il nous reçoive en grâce. » C’était là le langage des plus modérés d’entre les trois cents ; quant aux autres, presque tous n’épiaient que l’occasion de se saisir des sénateurs, comptant que, s’ils pouvaient les livrera César, ils apaiseraient plus facilement sa colère.

Caton, qui soupçonnait ce changement, ne voulut point approfondir ses soupçons : il écrivit à Scipion et à Juba de se tenir éloignés d’Utique, parce qu’il se défiait des trois cents ; et il renvoyâtes courriers, chargés de ses lettres. Les gens de cheval qui s’étaient sauvés de la bataille, et dont le nombre était assez considérable, s’étant approchés d’Utique, députèrent à Caton trois d’entre eux. Du reste ce n’était pas une résolution unanime de toute la troupe qu’apportaient ces députés ; car les uns voulaient aller trouver Juba, les autres préféraient se rendre auprès de Caton ; d’autres enfin craignaient d’entrer dans Utique. Caton, instruit de cette diversité de sentiments, chargea Marcus Rubrius de veiller sur les trois cents, et de recevoir les déclarations d’affranchissements, avec ordre d’user de douceur, et de ne forcer personne. Pour lui, il prend avec lui les sénateurs, sort d’Utique, et va s’aboucher avec les officiers de la cavalerie. Il les conjure de ne pas abandonner tant de sénateurs romains, de ne pas choisir pour chef Juba au lieu de Caton, mais de pourvoir tout à la fois et à leur salut et au salut de tous, en entrant dans une ville qu’il n’était pas facile de prendre d’emblée, et qui avait des