Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 4.djvu/365

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de temps après. Antoine fut aussi abandonné par deux des rois ses alliés, Amyntas et Déjotarus, qui embrassèrent le parti de César. Comme rien ne lui réussissait, et que sa flotte n’arrivait pas assez promptement pour lui être de quelque secours, il se vit contraint à recourir de nouveau à son armée de terre. Canidius, qui la commandait, changea d’avis à l’approche du danger : il conseilla à Antoine de renvoyer Cléopâtre, et de gagner la Thrace ou la Macédoine, pour y combattre par terre ; d’autant que Dicomès, roi des Gètes, promettait de venir à son secours avec un renfort considérable. « Il ne peut y avoir de honte pour toi, ajouta-t-il, à céder la mer à César, qui s’est exercé aux combats maritimes dans la guerre de Sicile ; mais ce serait une chose fort étrange, si, avec une expérience consommée dans les combats de terre, tu rendais inutile la valeur de tes légions, en les dispersant sur des vaisseaux pour y consumer sans fruit toute leur force. » Mais la volonté de Cléopâtre l’emporta sur ces représentations : elle fit décider qu’on combattrait sur mer. Déjà elle songeait à la fuite ; déjà même elle avait tout disposé, non pour aider à remporter la victoire, mais pour se ménager une retraite facile quand elle verrait tout perdu.

Or, une longue chaussée menait du camp d’Antoine à la rade où ses vaisseaux étaient à l’ancre ; et c’était le chemin qu’il suivait, en toute sécurité, pour aller visiter sa flotte. Un des domestiques de César s’en aperçut ; et, comme il eut dit à son maître qu’il serait facile d’enlever Antoine quand il passait par là, César y plaça des soldats en embuscade. Il s’en fallut peu que ceux-ci ne le prissent : ils saisirent celui qui marchait devant lui ; mais ils s’étaient levés trop tôt de leur embuscade, ce qui permit à Antoine de se sauver, quoiqu’à grand’peine, en courant à toutes jambes.

Après donc qu’il fut décidé qu’on combattrait sur