Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 4.djvu/531

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Statira lui disait ; « Que sont devenues ces paroles si souvent données par toi pour ton fils ? Et ces prières qui l’ont arraché à la mort quand il conspirait contre son frère, que sont-elles devenues ? C’est ton aveugle tendresse qui a allumé cette guerre, et attiré sur nous tous ces maux. » Parysatis, naturellement vindicative et violente, et dont le ressentiment était long à s’éteindre, conçut contre Statira une si implacable haine, qu’elle résolut de la faire mourir. Dinon prétend que ce fut pendant la guerre qu’elle mit son dessein à exécution : Ctésias, au contraire, dit que ce fut après ; et il n’est pas croyable que ce dernier ait ignoré l’époque, lui qui fut témoin de tout ce qui se passait, et qui n’avait aucun motif de changer les temps, ni de conter le fait autrement qu’il n’était arrivé ; quoique pourtant il s’éloigne souvent du vrai, pour se jeter dans des fables et des récits tragiques. Aussi ne rapporterons-nous cet événement qu’au temps où il l’a placé.

Cyrus s’avançait à grandes journées, quand il reçut différents avis de la résolution qu’avait prise le roi de tarder à combattre, et de ne se pas hâter d’en venir aux mains avec lui, mais d’attendre au fond de la Perse que les troupes qu’il rassemblait de tous côtés fussent réunies : en conséquence il avait tiré dans la plaine une tranchée large de dix brasses sur autant de profondeur, et qui s’étendait l’espace de quatre cents stades[1] Artaxerxès négligea d’en disputer le passage à Cyrus, et le laissa s’approcher de Babylone. Tiribaze osa le premier lui représenter qu’il ne devait pas fuir le combat et abandonner la Médie, Babylone, Suse même, pour se cacher au fond de la Perse, quand son armée était plusieurs fois aussi nombreuse que celle de son ennemi, et ses dix mille satrapes et capitaines supérieurs à Cyrus et

  1. Vingt lieues environ.