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POÈTES MORALISTES DE LA GRÈCE

lui-même en a dit dans ses poésies, où il se glorifie « d’avoir fait disparaître de l’Attique ces écriteaux qui désignaient les terres engagées pour dettes[1]. Le territoire d’Athènes, disait-il, auparavant esclave, est libre maintenant. » Les citoyens qu’on avait adjugés à leurs créanciers ont été, les uns ramenés des pays étrangers où on les avait vendus, et « où ils avaient si longtemps erré qu’ils n’entendaient plus la langue attique ; les autres remis eu liberté dans leur propre pays, où ils étaient réduits au plus honteux esclavage. »

Cette ordonnance lui attira le plus fâcheux déplaisir qu’il pût éprouver. Pendant qu’il s’occupait de cette abolition, qu’il travaillait à la présenter sous les termes les plus insinuants et à mettre en tête de sa loi un préambule convenable, il en communique le projet à trois de ses meilleurs amis, Conon, Clinias et Hipponicus, qui avaient toute sa confiance. Il leur dit qu’il ne toucherait pas aux terres et qu’il abolirait seulement les dettes. Ceux-ci se hâtant de prévenir la publication de la loi, empruntent à des gens riches des sommes considérables et en achètent des grands fonds de terre. Quand le décret eut paru, ils gardèrent les biens et ne rendirent pas l’argent qu’ils avaient emprunté. Leur mauvaise foi excita des plaintes amères contre Solon et le fit accuser d’avoir été non la dupe de ses amis,

  1. En Grèce, les propriétaires qui avaient engagé pour dettes leurs terres ou leurs maisons étaient obligés de mettre des écriteaux qui marquaient les sommes pour lesquelles ces biens étaient hypothéqués.