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Page:Poésies complètes de Robert Burns, 1843.djvu/101

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POÉSIES DE BURNS.

       Bien loin à l’occident,
Au fond du parloir, tout pensif,
       J’allai me reposer.

Là, solitaire, au coin du feu,
Je m’assis ct regardai la fumée qui, vomie,
Emplissait d’une vapeur suffocante
       La vieille maison d’argile ;
Et j’entendis les rats, toujours en mouvement, crier
       Sous le toit.

Tout entier dans cette atmosphère d’atomes et de brume,
Me reportant en arrière, je songeais au temps perdu,
Comme quoi j’avais passé le printemps de ma vie
       Et n’avais rien fait
Qu’enfiler des niaiseries en rimes
       Pour faire chanter des fous.

Si j’avais écouté un bon avis,
J’aurais pu, à cette heure, faire la loi au marché,
Ou me rarrer dans une banque et écrire
       Mes comptes de caisse :
Tandis qu’ici, à moitié fou, à moitié nourri, à moitié vêtu,
       Voilà le total.

Je me levai en murmurant : Imbécile ! niais !
Et tendis vers le ciel ma main gonflée
Pour jurer, par toute cette voûte étoilée,
       Ou quelque autre indiscret serment,
Que désormais je serais à l’épreuve de la rime
       Jusqu’à mon dernier soupir —

Quand, tictac ! la corde tira le loquet :
Et, crac ! la porte alla rejoindre le mur :
Et je vis, à la lueur de mon feu,
       Qui en ce moment flambait clair,
Une jeune fille étrangère, belle et bien mise,
       Apparaître en plein.

Vous vous doutez bien que je gardai le silence :
Le serment naissant fut écrasé à moitié formé ;
J’avais l’air aussi effrayé que si j’eusse été jeté
       Dans quelque vallon sauvage ;
Quand, charmante comme le mérite modeste, elle rougit
       Et entra.

De vertes, minces branches de houx, garnies de feuilles,
S’entrelaçaient gracieusement autour de son front,
Je la pris pour quelque muse écossaise
       À ce signe.