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DIVERSES

Contente entre ses bras de ton heureux destin,
Tu n’aurais pas des mers où le soleil se plonge
Fait sortir son char si matin,
Et j’aurais achevé mon songe.
Tu l’as interrompu par ton cruel retour
Dans l’endroit le plus agréable.
Je croyais être, hélas ! dans un charmant séjour,
Où sur un vert gazon de cent larcins coupable,
Je voyais à mes pieds l’amant le plus aimable,
Le plus plein de respect et le plus plein d’amour.
Le sommeil me rendait, ce me semble, moins fière ;
Et quand ton vif éclat a frappé ma paupière,
Il jurait de m’aimer jusqu’à son dernier jour.
Pour la perte d’une chimère
Ne me reproche point que je fais trop de bruit :
Je sais que la raison conduit
À ne regretter point ou ne regretter guère
Un faux bien qui dans l’air s’envole avec la nuit.
Mais réflexion importune !
Où trouve-t-on des biens certains
Que rien n’arrache de nos mains ?
Et ceux de la nature, et ceux de la fortune,
Que sont-ils, que des songes vains ?
Tout le temps qu’un beau songe dure,
Si nous sommes aussi contens