Page:Poésies de Malherbe.djvu/31

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Malherbe se rendit lui-même à La Rochelle. Mais Richelieu ne lui était guère plus favorable que Sully. Le poète, ayant voulu louer le cardinal, n’avait trouvé rien de mieux que de rajuster en son honneur deux strophes qu’il avait commencées il y avait trente ans. Corneille touche à Malherbe dans la haine de Richelieu.

Malherbe donc, ne trouvant pas bon accueil auprès du roi, en revint à l’idée de se battre. Comme il le disait tout haut à de Nesle dans la cour du logis du roi, et que les pages en riaient, Racan le prit à part pour le calmer ; mais il n’en put tirer autre que la réponse déjà faite à Balzac. Le vieux poète, mal accueilli de la jeune cour, s’en revint tristement à Paris, ayant au cœur le germe de la maladie dont il devait mourir cette même année, 1628. Sa fin ressembla au reste de sa vie. Plus d’une fois ses yeux mourants cherchèrent Racan à ses côtés. Mais il l’avait laissé à La Rochelle, où il commandait les gendarmes du maréchal d’Effiat.

Lorsqu’on lui parla de se confesser (c’est Yvrande qui le racontait à Racan), il répondit qu’il n’avait l’habitude de le faire qu’à la Toussaint ; et comme on lui représenta qu’il avait toujours fait comme les autres, et que les autres se confessaient avant de mourir : — « Je veux donc aussi me confesser, répliqua-t-il, je veux aller où vont les autres. » Il envoya querir le vicaire de Saint-Germain-l’Auxerrois.

Une heure avant de mourir, il se réveilla tout à coup en sursaut. Il n’avait pas entendu, comme Mirabeau, le canon qui annonçait les funérailles d’Achille ; c’était tout simplement sa garde qui se servait d’un mot impropre. On lui recommanda de se tenir en repos : « Laissez, dit-il, je maintiendrai jusqu’au bout la pureté de la langue française. » Ce furent à peu près ses dernières paroles. Elles résument toute sa vie.

Placé entre les aventureux disciples de l’école de Ronsard et les pacifiques créateurs du grand siècle, Malherbe parut comprendre qu’à cette littérature qui