Page:Poésies de Schiller.djvu/271

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Junon, (embarrassée.)

Rien, mon enfant ; la noire jalousie me tourmente aussi : ah ! un regard vif, pénétrant, peut souvent être considéré comme un regard jaloux, et les yeux de bœuf ne sont pas de si vilains yeux.

Sémélé.

Oh ! fi donc, Béroé ! les plus vilains que l’on puisse voir. Puis, ajoute à cela des joues vertes et jaunes, où l’on voit les marques visibles du venin de l’envie. J’ai pitié de Jupiter quand je pense que Junon, avec son hideux amour, ne lui fait pas grâce d’une nuit, et le poursuit sans cesse de ses soupçons : ce doit être une vraie roue d’Ixion dans le ciel.

Junon, (dans le plus grand trouble et en fureur).

Ne parlons plus de cela.

Sémélé.

Comment, Béroé ! tu me réponds d’un ton si amer ? Ai-je outre-passé les bornes de la vérité et de la prudence ?

Junon.

Oui, jeune femme, tu les as outre-passées : réjouis-toi, si tes yeux bleus ne te conduisent pas trop tôt dans la barque de Caron. Saturnia a aussi des temples, des autels : elle siège parmi les humains, et ne punit rien aussi sévèrement que les sots railleurs.

Sémélé.

Qu’elle vienne donc et soit témoin de la raillerie !