Page:Poe - Contes grotesques trad. Émile Hennequin, 1882.djvu/177

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(Nous omettons ici une partie du Journal, concernant les mœurs des Sioux).

6 septembre. Le pays était ouvert et le temps remarquablement beau, en sorte que, malgré l’attente d’une attaque prochaine, nous étions d’assez belle humeur. Jusque là nous n’avions pas aperçu l’ombre d’un Indien et nous avancions rapidement à travers leur redouté territoire. Je connaissais trop bien la tactique des sauvages pour supposer que nous n’étions pas surveillés de près. J’avais la conviction que mous entendrions parler des Titons (tribu des Sioux), à la première gorge qui leur fournirait une bonne embuscade.

Vers midi, un des Canadiens, se mit à brailler, « les Sioux, les Sioux ! », montrant du doigt un ravin long, étroit, qui coupait la prairie à notre gauche, partant du Missouri et allant aussi loin vers le Sud, que l’œil pouvait le suivre. Ce ravin servait de lit à un petit affluent, dont les eaux étaient basses, et les flancs s’en dressaient de chaque côté, comme d’énormes et véritables murailles. Au moyen d’une longue vue, je distinguai immédiatement ce qui avait fait donner l’alarme au Canadien. Une longue troupe de Sioux descendait la gorge, à la file indienne, tachant de se dissimuler de son mieux. Mais les plumes de leur coiffure les avaient fait découvrir, car, à chaque instant, nous en voyions quelqu’une dépasser les bords du ravin, quand un accident du sol forçait les guerriers à remonter plus haut. Nous devinâmes aux oscillations de ces plumes, que les Sioux étaient à cheval.

La troupe venait à nous avec une grande rapidité.