Page:Poe - Contes inédits traduction William L. Hughes, Hetzel.djvu/164

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pensée distraite avait abandonné le livre ouvert sur mes genoux pour rêver à la tristesse et à la désolation de la ville voisine.

Mon regard, en quittant la page inachevée, tomba sur le versant dépouillé dont j’ai parlé, et sur un objet, — ou plutôt sur un monstre vivant, d’une conformation hideuse, — qui descendit rapidement du sommet de la colline, et disparut dans l’épaisse forêt qui se trouvait au bas.

En apercevant d’abord cette horrible créature, je doutai de ma raison, — ou, tout au moins, j’eus de la peine à en croire mes yeux, et il me fallut plusieurs minutes pour m’assurer que je n’étais ni fou, ni sous l’influence d’un rêve. Cependant, lorsque j’aurai décrit le monstre (que je vis très-distinctement et que je contemplai avec calme pendant tout le temps qu’il mit à arriver au bas de la colline), mes lecteurs, je le crains, auront plus de difficulté que moi à se convaincre que je ne subissais ni l’une ni l’autre de ces influences.

En comparant la taille de cet affreux animal au diamètre des grands arbres auprès desquels il passa, — aux rares géants de la forêt que l’impétuosité de l’éboulement avait respectés, — je dus conclure qu’il surpassait de beaucoup le plus grand vaisseau de ligne qu’on ait encore construit. Je dis vaisseau de ligne, parce que la forme du