Page:Poe - Histoires grotesques et sérieuses.djvu/181

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mon âme était restée fidèle à ses serments, et, durant les heures silencieuses de la nuit, Éléonora me donnait toujours des symptômes de sa présence. Subitement ces manifestations cessèrent ; et le monde devint noir devant mes yeux ; et je restai épouvanté des pensées brûlantes qui me possédaient, des tentations terribles qui m’assiégeaient ; car de loin, de très-loin, de quelque contrée inconnue, était venue, à la cour du roi que je servais, une fille dont la beauté conquit tout de suite mon cœur apostat, — devant l’autel de qui je me prosternai, sans la moindre résistance, avec la plus ardente et la plus abjecte idolâtrie d’amour. Qu’était, en vérité, ma passion pour la jeune fille de la vallée en comparaison de la ferveur, du délire et de l’extase enlevante d’adoration avec lesquels je répandais toute mon âme en larmes aux pieds de l’éthéréenne Ermengarde ? — Oh ! brillante était la séraphique Ermengarde ! Et cette idée ne laissait en moi de place à aucune autre. — Oh ! divine était l’angélique Ermengarde ! Et quand je plongeais dans les profondeurs de ses yeux imprégnés de ressouvenance, je ne rêvais que d’eux — et d’elle.

Je l’épousai ; — et je ne craignis pas la malédic-