Page:Poe - Nouvelles Histoires extraordinaires.djvu/297

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eiros. — Notre catastrophe était, comme tu le dis, absolument inattendue ; mais des accidents analogues avaient été depuis longtemps un sujet de discussion parmi les astronomes. Ai-je besoin de te dire, mon amie, que, même quand tu nous quittas, les hommes s’accordaient à interpréter, comme ayant trait seulement au globe de la terre, les passages des très saintes Écritures qui parlent de la destruction finale de toutes choses par le feu ? Mais, relativement à l’agent immédiat de la ruine, la pensée humaine était en défaut depuis l’époque où la science astronomique avait dépouillé les comètes de leur effrayant caractère incendiaire. La très médiocre densité de ces corps avait été bien démontrée. On les avait observés dans leur passage à travers les satellites de Jupiter, et ils n’avaient causé aucune altération sensible dans les masses ni dans les orbites de ces planètes secondaires. Nous regardions depuis longtemps ces voyageurs comme de vaporeuses créations d’une inconcevable ténuité, incapables d’endommager notre globe massif, même dans le cas d’un contact. D’ailleurs, ce contact n’était redouté en aucune façon ; car les éléments de toutes les comètes étaient exactement connus. Que nous dussions chercher parmi elles l’agent igné de la destruction prophétisée, cela était depuis de longues années considéré comme une idée inadmissible. Mais le merveilleux, les imaginations bizarres avaient, dans ces derniers jours, singulièrement régné parmi l’humanité ; et, quoique une crainte véritable ne pût avoir de prise que sur quelques ignorants, quand les astronomes annoncèrent une nouvelle comète, cette annonce fut généralement reçue avec je ne sais quelle agitation et quelle méfiance.

Les éléments de l’astre étranger furent immédiatement calculés, et tous les observateurs reconnurent d’un même accord que sa route, à son périhélie, devait l’amener à une proximité presque immédiate de la terre. Il se trouva deux ou trois astronomes, d’une réputation secondaire, qui soutinrent résolument