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ALBERT THOMAS RETOUR DU FRONT

Albert Thomas, qui vient de passer quelques jours au front (armées Debeney, corps Mangin et corps Pelle), me rapporte des impressions satisfaisantes. Il me parle ensuite de l’affaire Sixte. « Je regrette, me dit-il, que Clemenceau ait cru devoir publier la lettre de l’Empereur. Il m’a dit que cette publication avait eu lieu d’accord avec vous. Est-ce vrai ? — Non, dis-je, ce n’est pas exact. J’ai nettement déconseillé à Clemenceau toute allusion à cette affaire et je l’ai mis en garde contre la publication. Je suis très étonné qu’il m’ait prêté une attitude que je n’ai pas eue. »

M. André Bénac vient me dire que, sur la foi de renseignements anglais, Pichon veut faire interdire l’entrée de la France à Davidoff, l’ancien collaborateur de Kokovtzoff, actuellement réfugié à Stockholm. Bénac croit qu’il serait dangereux de nous aliéner Davidoff, mais Pichon pense que c’est un des conservateurs russes qui se sont rapprochés des Allemands.

Galli revient du front, lui aussi, avec des impressions satisfaisantes.


Mardi 30 avril.

Conseil des ministres. Clemenceau indique en termes volontairement vagues les questions qui devraient être traitées demain et après à Abbeville. Pas un mot des événements militaires, pas un mot de la direction de la guerre. Nail fait un timide essai pour proposer une réforme de la magistrature ; il est rabroué par Klotz et par Clemenceau. Pichon lit obscurément quelques télégrammes sur le Japon, la Russie, la Hollande. Mais aucune discussion n’est ouverte, aucune question n’est soumise au Conseil. À l’heure présente, d’ailleurs, le gouvernement ne sait rien encore de l’affaire Sixte, qui traîne dans les couloirs de la Chambre. Pams propose directement le