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LA VICTOIRE

quête de l’Aisne se poursuit. Jeanneney s’en occupe ; il sera en mesure de vous en parler au prochain Conseil, n’est-ce pas, Jeanneney ? — Oui, certainement. » Puis, avec un nouveau mouvement d’imprudence, Clemenceau donne des renseignements secrets que Pétain nous a fait tenir à lui et à moi, par les officiers de liaison, de la façon la plus confidentielle. On s’attend à trois attaques allemandes, l’une secondaire vers la Suisse et Reims, une autre vers Compiègne, une autre, la principale, dans la direction d’Abbeville.

Ensuite, affaires courantes. Pichon rend compte de la remise du drapeau à l’armée tchèque. Il apprend ensuite au Conseil et à moi que Clemenceau et lui ont reçu ensemble la visite de Kerensky. Celui-ci leur a déclaré qu’il était d’accord avec notre consul général à Moscou pour demander aux Alliés un appui financier destiné à organiser un mouvement contre les Bolcheviks et en faveur de l’intervention alliée. Clemenceau et Pichon lui ont fait remarquer que le consul ne leur avait rien télégraphié à ce sujet. Il semble, d’ailleurs, que Kerensky soit suspect. Clemenceau qui, autrefois, faisait hyperboliquement son éloge dans un article intitulé De Kerensky à Poincaré, a tout à fait changé de sentiment et parle maintenant de lui avec ironie. Pichon a télégraphié à Moscou pour tâcher de savoir la vérité.

Le général Pillot, nommé commandant de la place de Paris, me parle des fautes commises au Chemin des Dames et des dangers de la défensive passive.

Métin, chargé de mission en Australie, doit prochainement partir avec le général Pau. Il se plaint du peu d’empressement qu’il trouve chez les industriels et les commerçants. Même mobilisés, ils répugnent à l’accompagner. Métin voudrait que Pau n’emmenât avec lui qu’un officier.