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SAMPIGNY EN RUINE

et je lui promets de faire le possible pour que ces enfants soient rendus. Nous passons ensuite à l’hôpital dont la façade extérieure est décorée de tentures blanches, brodées et ornées de motifs et de devises patriotiques. Comme nous félicitons la sœur supérieure, une autre sœur, le type de la Lorraine énergique, nous explique qu’elle a fait ce travail « sous le nez des Allemands », par petits fragments qu’elle réunissait la nuit à leur insu.

Visite aux deux églises, l’une et l’autre assez légèrement endommagées. Les Allemands, qui ont enlevé un retable de Ligier Richier à Hattonchâtel, des boiseries, un Christ et d’autres objets d’art, ont respecté le sépulcre de Ligier Richier, sans doute à cause des difficultés de transport. Ils ont même affecté de le protéger par des sacs à terre.

Nous revenons prendre les autos devant la mairie. Le général de Belenet a rangé là une compagnie d’honneur et une musique militaire. Quelques minutes avant notre départ arrive le général Berdoulat, commandant le 2e corps colonial, dont le quartier général est à Rupt devant Saint-Mihiel. Au moment de notre départ, la musique de la 26e division joue la Marseillaise que les habitants n’ont plus entendue depuis quatre ans et dont les accents les font pleurer de joie.

Nous revenons à Sampigny le cœur trop plein… Nous remontons dans notre wagon garé pour y déjeuner avec Lebrun, Grosdidier, le préfet, les sous-préfets. Après le repas, nous nous rendons aux restes de notre chère maison du Clos, par les rues désertes, bordées de ruines. Nous ne rencontrons que quelques uniformes français et beaucoup plus d’Américains.

Notre pauvre jardin est transformé en terrain dévasté et en forêt vierge. Le lierre a dévoré les