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LA VICTOIRE

Avant le Comité de guerre, je dis au général Alby : « Ne croyez-vous pas que l’armée d’Orient devrait d’abord en finir avec Constantinople ? » Il répond : « Les Anglais doivent, paraît-il, nous proposer de prélever deux de leurs divisions en Palestine pour les faire marcher par la Bulgarie sur Constantinople. — Mais, lui dis-je, il n’est pas admissible qu’ils fassent une opération en dehors de nous. Elle ne peut être faite que par Franchet d’Esperey avec des troupes franco-britanniques. »

Comité de guerre. Clemenceau déclare que l’Allemagne se désintéresse de la Turquie. Il en a, dit-il, la preuve, résultant d’un document certain. Il ne donne pas d’autre explication. Pichon m’indique qu’il s’agit d’un déchiffrement qu’il ne précise d’ailleurs pas. Mais ce document, paraît-il, établit que l’Allemagne s’est engagée envers le gouvernement bolchevik à ne pas soutenir la Turquie

Klotz expose que la Commission de l’armée a adopté en principe une augmentation d’un franc par jour pour la solde. La commission a naïvement ajouté que la dépense ne serait pas trop forte, la guerre devant être finie dans trois mois. Je dénonce au Comité le péril de cet optimisme Clemenceau est de mon avis. Pétain, qui est présent, trouve que l’augmentation de solde risque d’entraîner l’ivresse et l’indiscipline.

Klotz suggère qu’on accepte une augmentation au profit des familles. Clemenceau approuve Klotz. Pétain expose la situation de nos effectifs. Il manque au moins mille hommes à chacune de nos divisions et il y en a deux auxquelles il manque 3 000 hommes. C’est, au total, un manque de 180 000 hommes. « Mais, dit-il, on fera les réductions nécessaires et malgré tout, on se tirera d’affaire. »