Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 4, 1927.djvu/24

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avoir provoqué chez M. von Gwinner une courte crise de conscience. Mr James W. Gérard, qui était en 1914 ambassadeur des États-Unis à Berlin, a publié, en mars 1926, dans Current History, un article où, disculpant la France de toute responsabilité dans le conflit, il donnait, à la charge de l’Allemagne, ce curieux détail : « M. de Gwinner, chef de la Deutsche Bank, m’a rapporté, peu de temps après l’explosion, que les officiers du grand État-major s’étaient présentés devant l’Empereur et lui avaient dit qu’ils briseraient leurs épées sur leurs genoux, s’il ne signait pas la déclaration de guerre. » D’autre part, l’amiral Tirpitz lui-même a affirmé, dans le livre qu’il a publié en 1926, que M. de Gwinner avait déclaré, en 1913, à l’amiral von Capelle, qu’un groupe de personnalités placées au centre dirigeant de l’Allemagne avaient voulu la guerre et y avaient poussé. Et voilà certes des témoignages dont la concordance ne laisse pas d’être impressionnante. M. Theodor Wolff l’a si bien senti que, dans le Berliner Tageblatt du 24 octobre 1926, il s’est écrié que l’amiral von Tirpitz donnait « un coup de poignard dans le dos de ceux qui consacrent leurs jours à réfuter la thèse de culpabilité, contenue dans le traité de Versailles ». Ces révélations ont, en effet, beaucoup gêné M. de Gwinner et, pour se protéger contre les attaques que lui attiraient, de la part des « innocentistes », ses aveux de 1914, il a cru devoir ramasser, en réponse à M. l’ambassadeur Gérard et à l’amiral von Tirpitz, les plus sottes des calomnies qui avaient été proférées contre la France et, en particulier, contre le Président de la République. Il en a composé un article10,