Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 4, 1927.djvu/33

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Peut-être diminuait-il un peu son autorité par le soin excessif qu’il prenait de l’affirmer et de la mettre en lumière. Il débordait volontiers de son cadre et, après avoir été président du Conseil, se résignait mal aux modestes fonctions de ministre. M. Noulens, dont le visage débonnaire n’avait rien de martial, défendait comme un bon capitaine l’armée dont il était le chef. M. Monis, excellent avocat girondin, dont la voix musicale dominait aisément le tumulte des assemblées, remplissait consciencieusement son devoir de ministre de la Marine. M. Viviani, grand maître de l’Université, mettait au service des lettres et des arts son magnifique talent d’orateur. Mon ancien collègue de 1912, M. Fernand David, dirigeait les Travaux publics avec le même soin qu’il avait fait le ministère du Commerce. Chargé de ce dernier département, M. Malvy, dont le regard noir et fiévreux, le teint un peu jaune, la poitrine rentrée, semblaient annoncer une santé fragile, dépensait, au contraire, dans la vie politique, une infatigable activité. C’était un remarquable manœuvrier parlementaire, qui exerçait sur les groupes de gauche une influence grandissante. M. Maurice Raynaud, ancien avoué au tribunal de la Seine, dirigeait le ministère de l’Agriculture avec un radicalisme parfois un peu chicanier. Mon ami M. Albert Lebrun présidait avec autant de tact que de clairvoyance aux destinées de notre empire colonial. Le regretté M. Métin, ministre du Travail, était un homme laborieux et cultivé, qui restait volontairement effacé. M. René Renoult était doublé, à l’Intérieur, d’un sous-secrétaire d’État fort intelligent, qui devait fournir une belle carrière, M. Raoul Péret. M. Noulens avait, lui aussi, à la