Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/128

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cent mille hommes, ni même avant qu’ils aient été tous concentrés, ce qui nous mène sans doute, comme me l’a dit le maréchal French, à la date du 25 août.

Quoique la tentative d’enveloppement commencée par l’ennemi apparaisse de plus en plus large et de plus en plus menaçante, le grand quartier général ne peut naturellement pas savoir si les Allemands ne prendront pas lc parti d’interrompre leur marche pour rabattre leur droite face à notre frontière et pour tomber brusquement sur le centre de nos armées. Dans les instructions qu’il donne aujourd’hui, le général Joffre croit donc prudent de ne pas exclure cette hypothèse et il prescrit que, si elle se réalise, notre 5e armée devra franchir la Meuse de l’ouest à l’est, pour se jeter sur le flanc droit des colonnes ennemies. Si, au contraire, les Allemands continuent d’avancer vers l’ouest, cette même 5e armée, en liaison avec les Belges et les Anglais, barrera la route à l’aile marchante de l’ennemi, pendant que nos armées du centre, 4e et 3e, attaqueront elles-mêmes le centre adverse.

Avant que s’engage l’une ou l’autre de ces batailles, je viens d’avoir sous les yeux un émouvant symbole de la victoire. Hier soir, a été remis à l’Élysée, par deux officiers et un sous-officier, un grand fanion qui a les dimensions d’un drapeau. C’est celui du 4e bataillon du 132e régiment allemand. Il a été pris, je l’ai dit, sur le plateau de Saint-Blaise par notre 1er bataillon de chasseurs à pied : hampe très longue, étamine rose groseille, coupée d’une croix blanche. Au milieu, l’aigle impérial, brandissant la foudre et le glaive, et surmonté d’une banderole avec cette devise : Pro gloria