Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/234

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et que nous interceptons, les 2e, 3e, 4e armées ennemies, celles de Bülow, de Hausen et de Wurtemberg, doivent seules talonner nos armées en retraite et les suivre, au besoin, jusque sur la haute Seine et sur l’Aube. La 1re armée, celle de von Klück, est chargée de couvrir les autres à l’aile droite, du côté de Paris, de détruire les communications autour de la capitale, de contenir les troupes du camp retranché et, si possible, de les investir.

Ce sont ces instructions du général de Moltke connues de notre état-major, qui, ces jours derniers, avaient poussé le général Joffre à insister pour notre départ de Paris. Or aujourd’hui même, à onze heures du matin, un de nos officiers de cavalerie, le capitaine Lepic, opérant une reconnaissance au nord-ouest de la région de Compiègne, a, sans que nous en fussions informés, constaté avec étonnement que l’avant-garde de l’armée von Klück, au lieu de continuer à marcher directement sur Paris, venait de prendre brusquement une orientation différente et de se diriger vers Meaux. Nous l’ignorons. Nous ignorons que c’est von Klück qui a eu personnellement la singulière idée d’ordonner cette conversion inattendue. La retraite isolée des Anglais lui a fait espérer qu’il allait pouvoir tourner l’aile gauche de notre armée, l’attaquer par derrière, la mettre en déroute et revenir ensuite triomphalement à Paris. Il compte sans l’armée Maunoury. Il compte sans Joffre, sans Gallieni, sans Foch. Mais son aveuglement va, du moins, retarder tout danger pour Paris.

Et cela nous ne le savons pas. Le renseignement du capitaine Lepic ne nous a pas été signalé. A-t-on voulu attendre, au G. Q. G., qu’il fût contrôlé