Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 5, 1929.djvu/515

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jusqu’au littoral de la mer du Nord, nous avons dressé devant lui une barrière infranchissable. Il a accumulé ses forces en Belgique pour nous déborder par la côte et atteindre nos bases maritimes : son attaque a été brisée. Il a cherché à nous couper au sud d’Ypres ; stérile effort ; nous avons maintenu nos positions. Bref, l’ennemi a enregistré, depuis le début de la campagne, outre la faillite de son plan d’ensemble, qui comportait le rapide écrasement de la Belgique et de la France, par la guerre de terreur, sept échecs d’une portée considérable ; échec de l’attaque brusquée sur Nancy, échec de la marche rapide sur Paris, échec de l’enveloppement de notre gauche au mois d’août, échec de la percée de notre centre en septembre, échec de l’attaque par la côte sur Dunkerque et Calais, nouvel échec de l’enveloppement sur notre gauche en novembre, échec de l’attaque sur Ypres. Si puissante et si bien outillée qu’elle soit, l’armée allemande n’est donc parvenue sur aucun point à s’assurer un avantage décisif.

Joffre nous dit qu’il constate, au contraire, les progrès continus de notre armée. Progrès moral ; car elle a maintenant pris conscience de sa valeur et de sa force de résistance. Progrès technique ; car elle a de mieux en mieux appris la guerre en la faisant ; elle sait utiliser le terrain et pratique beaucoup plus utilement qu’au début l’organisation défensive. Progrès physique également : assouplissement des corps, endurance acquise, adaptation à une vie nouvelle, la plus rude peut-être qu’ait jamais connue l’humanité. Progrès matériel enfin : création, encore insuffisante, il est vrai, de l’artillerie lourde ; approvisionnements