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CHAPITRE II


DÉPART DE DUNKERQUE. — EN MER. — LE CONSEIL AUSTRO-HONGROIS DU 19 JUILLET. — EN RADE DE CRONSTADT. — DÎNER À PETERHOF. — CONVERSATIONS AVEC L’EMPEREUR. — VISITE À SAINT-PÉTERSBOURG. — RÉCEPTIONS DES CORPS DIPLOMATIQUES. — À LA DOUMA MUNICIPALE. — L’IMPÉRATRICE ET SES ENFANTS. — À KRASNOIÉ-SÉLO. — DÎNER À BORD DE LA « FRANCE ».


Nous arriverons à Dunkerque avant cinq heures du matin. MM. Trépont, préfet du Nord, Delavey, sous-préfet, Terquem, maire, Defossé, député, Vancauvenberghe, président du Conseil général, viennent me saluer dans mon wagon et presque aussitôt le train se dirige par le port jusqu’à l’écluse Trystram. Là, je mets pied à terre et monte sur un remorqueur de la compagnie locale. Malgré l’heure matinale, un certain nombre d’habitants se sont groupés sur les quais. Le remorqueur nous conduit en rade jusque sur le front des deux cuirassés qui nous attendent, France et Jean-Bart. Tous deux tirent les salves réglementaires. Les équipages, alignés sur le pont, immobiles, face à l’extérieur, poussent les cris de « Vive la République ! ».

Nous appareillons et nous gagnons la mer du Nord, « en ligne de file », par un temps d’abord frais et brumeux, qui peu à peu se dégage et se réchauffe. Voici donc que je reprends cette route marine, que j’ai suivie il y a deux ans, et dont le souvenir s’associe en moi à des images de larges horizons et à la sensation d’un doux farniente, bercé par le roulis.

La France, qui nous emmène vers le Nord et que le Jean-Bart suit fidèlement à distance respectueuse, vient à peine d’achever ses essais. Elle donne un peu l’impression d’une maison neuve, encore incomplètement aménagée. Les peintures sont fraîches. La cuirasse n’a reçu qu’une