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Page:Poincaré - La Valeur de la science.djvu/159

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L’ANALYSE ET LA PHYSIQUE

nous conduisent souvent à des sommets d’où nous découvrons des paysages nouveaux. Quoi de plus utile !

Il en est des symboles mathématiques comme des réalités physiques ; c’est en comparant les aspects différents des choses que nous pourrons en comprendre l’harmonie intime, qui seule est belle et par conséquent digne de nos efforts.

Le premier exemple que je citerai est tellement ancien qu’on serait tenté de l’oublier ; il n’en est pas moins le plus important de tous.

Le seul objet naturel de la pensée mathématique, c’est le nombre entier. C’est le monde extérieur qui nous a imposé le continu, que nous avons inventé sans doute, mais qu’il nous a forcés à inventer.

Sans lui il n’y aurait pas d’analyse infinitésimale ; toute la science mathématique se réduirait à l’arithmétique ou à la théorie des substitutions.

Au contraire, nous avons consacré à l’étude du continu presque tout notre temps et toutes nos forces. Qui le regrettera ; qui croira que ce temps et ces forces ont été perdus ?

L’analyse nous déroule des perspectives infinies que l’arithmétique ne soupçonne pas ; elle vous montre d’un coup d’œil un ensemble grandiose, dont l’ordonnance est simple et symétrique ; au