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Page:Poincaré - La Valeur de la science.djvu/47

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LA MESURE DU TEMPS

II


Mais ce n’est pas tout ; dans cette forme nous voulons faire rentrer non seulement les phénomènes de notre conscience, mais ceux dont les autres consciences sont le théâtre. Bien plus, nous voulons y faire rentrer les faits physiques, ces je ne sais quoi dont nous peuplons l’espace et que nulle conscience ne voit directement. Il le faut bien car sans cela la science ne pourrait exister. En un mot, le temps psychologique nous est donné et nous voulons créer le temps scientifique et physique. C’est là que la difficulté commence, ou plutôt les difficultés, car il y en a deux.

Voilà deux consciences qui sont comme deux mondes impénétrables l’un à l’autre. De quel droit voulons-nous les faire entrer dans un même moule, les mesurer avec la même toise ? N’est-ce pas comme si l’on voulait mesurer avec un gramme ou peser avec un mètre ?

Et d’ailleurs, pourquoi parlons-nous de mesure ? Nous savons peut-être que tel fait est antérieur à tel autre, mais non de combien il est antérieur.

Donc deux difficultés :

1o Pouvons-nous transformer le temps psychologique, qui est qualitatif, en un temps quantitatif ?