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théorie de m. arrhenius

d’étoiles, soleil chaud, soleil refroidi, soleil éteint. Le choc de deux soleils éteints donne de nouveau une Nova.

188.M. Arrhenius pense que le Monde est infini. S’il n’en était pas ainsi, dit-il, les poussières seraient chassées indéfiniment par la pression de radiation, elles ne seraient pas captées en chemin, et le monde finirait par s’évanouir. Cette raison n’est pas convaincante, car on peut penser qu’une fois arrivées à de très grandes distances, les poussières ne subissent plus la pression de radiation, la lumière étant toujours plus ou moins absorbée dans son parcours.

Si l’Univers est infini, une droite de direction quelconque, issue de notre œil, doit finir par rencontrer une étoile : il semble en résulter que le Ciel tout entier devrait avoir l’éclat du Soleil. Mais cette conclusion n’est pas légitime, parce que, comme nous venons de le dire, la lumière subit toujours une absorption plus ou moins forte dans les espaces interstellaires. Dans l’ordre d’idées de M. Arrhenius, cette absorption serait due aux soleils éteints, et surtout aux matières cosmiques nébuleuses obscures beaucoup plus grandes, qu’il suppose abondamment répandues dans l’espace. Ce dernier point de vue semble trouver sa confirmation dans un phénomène qu’a présenté la Nova Persei : on a observé autour de cette étoile nouvelle plusieurs nébulosités sphériques s’éloignant du centre, comme des ondes, avec des vitesses comparables à celle de la lumière ; il semble qu’on puisse supposer que la lumière de l’explosion est venue successivement rendre visible les diverses couches d’une immense nébuleuse, ou bien encore que c’étaient là des vitesses de propagation d’une luminescence (due par exemple à un bombardement cathodique) à travers une nébulosité obscure par elle-même, plutôt que des vitesses réelles de corps matériels.

189.Abordons maintenant un point très délicat de cette théorie. M. Arrhenius, supposant que l’Univers, dans son évolution des nébuleuses aux soleils et des soleils aux nébuleuses, décrit une sorte de cycle fermé, est amené à penser que l’Univers ne doit pas « vieillir ». Il cherche donc à échapper à la « mort calorifique » (Wärmetod) que Clausius avait cru pouvoir assigner à l’Univers, d’après le second principe de la Thermodynamique (Principe de Carnot-Clausius).

Ce second principe, on l’énonce parfois d’une façon peu correcte en disant qu’ « un système matériel tend vers l’homogénéité tant au