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Page:Poincaré - Leçons sur les hypothèses cosmogoniques, 1911.djvu/29

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hypothèse de kant

Soleil a été formé lui sont parvenues affectées déjà par ce genre de déviation, en sorte que le corps résultant, le Soleil, s’est trouvé animé d’une rotation dans le même sens. » (p. 132-133)

La pensée de Kant, à laquelle aucun mathématicien ne saurait se rallier, se comprend sans difficulté et il est aisé de voir quelle a été l’origine de l’erreur ; dans une foule la police impose parfois un sens déterminé de circulation afin d’éviter les heurts et les encombrements. Kant imagine qu’il s’établit entre les particules en mouvement une sorte de police spontanée et automatique, par l’effet des chocs eux-mêmes. Inutile d’ajouter que les affirmations de Kant sont en contradiction formelle avec le principe des aires, d’après lequel le moment de rotation d’un système soustrait à toute action extérieure est constant : ce moment de rotation doit rester toujours nul s’il l’est initialement. Il est donc impossible qu’un système partant du repos ait engendré le système solaire, pour lequel le moment de rotation n’est pas nul : or, Kant suppose explicitement que la matière primitive du Soleil part du repos. Pourquoi Kant n’a-t-il pas supposé, comme le fit plus tard Laplace, une rotation initiale ? C’est que Laplace se bornera à considérer la nébuleuse d’où est sorti le système solaire, tandis que Kant a voulu essayer d’expliquer la formation de la Voie Lactée tout entière. Peut-être aussi Kant a-t-il trouvé plus philosophique de ne pas supposer un mouvement initial.

2.Quoi qu’il en soit, Kant pense que, vers le centre de sa nébuleuse, va se former une condensation prépondérante (Soleil), autour de laquelle les particules vont circuler, à peu près dans un même plan, suivant les lois de Képler ; ces particules donneront par la suite des condensations secondaires (planètes) :

« Ainsi l’équateur solaire n’est autre chose que le plan de cette circulation générale. Or, les particules qui se trouvaient hors de ce plan ont dû, en vertu des lois de la gravitation, aller le rencontrer quelque part dans leur mouvement de circulation et s’y accumuler, surtout vers la région centrale. D’ailleurs, au milieu de ces particules se poussant, se résistant l’une à l’autre, celles-là seules ont dû continuer à se mouvoir librement en cercles concentriques qui étaient arrivées à ces cercles juste avec la vitesse linéaire exigée par les lois des forces centrales. Cette vitesse résulte de la hauteur de chute ; la déviation