Page:Poincaré - Science et méthode (Édition définitive).djvu/131

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sont formées de sensations qui peuvent n’avoir rien de commun et cependant nous les regarderons comme définissant un même point de l’espace, parce qu’elles peuvent répondre à ce même danger et qu’elles sont les unes et les autres associées à la notion de ce danger. C’est la possibilité de parer un même coup, qui fait l’unité de ces parades diverses, comme c’est la possibilité d’être parés de la même façon qui fait l’unité des coups de nature si diverse, qui peuvent nous menacer d’un même point de l’espace. C’est cette double unité qui fait l’individualité de chaque point de l’espace, et, dans la notion de point, il n’y a pas autre chose.

L’espace que j’envisageais dans le paragraphe précédent, et que je pourrais appeler l’espace restreint, était rapporté à des axes de coordonnées liés à mon corps ; ces axes étaient fixes, puisque mon corps ne bougeait pas et que mes membres seuls se déplaçaient. Quels sont les axes auxquels se rapporte naturellement l'espace étendu ? c’est-à-dire le nouvel espace que je viens de définir. Nous définissons un point par la suite de mouvements qu’il convient de faire pour l’atteindre à partir d’une certaine position initiale du corps. Les axes sont donc liés à cette position initiale du corps.

Mais la position que j’appelle initiale peut être arbitrairement choisie parmi toutes les positions que mon corps a successivement occupées ; si la mémoire plus ou moins inconsciente de ces positions successives