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Mais ce n’est pas là le plus important. C’est au contact des lettres antiques que nous apprenons le mieux à nous détourner de ce qui n’a qu’un intérêt contingent et particulier, à ne nous intéresser qu’à ce qui est général, à aspirer toujours à quelque idéal. Ceux qui y ont goûté deviennent incapables de borner leur horizon ; la vie extérieure ne leur parle que de leurs intérêts d’un jour, mais ils ne l’écoutent qu’à moitié, ils ont hâte qu’on leur fasse voir autre chose, ils emportent partout la nostalgie d’une patrie plus haute… Et ce serait là peut-être une objection sérieuse contre les études classiques. S’il est à désirer que sur dix Français, neuf deviennent de bons commerçants et des hommes d’affaires, n’est-il pas dangereux de les dégoûter d’avance de ce qui doit remplir leur vie. Sans doute il ne serait pas impossible de réfuter cette objection ; mais ce n’est pas là mon affaire, ce n’est pas le