Aller au contenu

Page:Poirier - Les arpents de neige, 1909.djvu/106

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
91
une imprudence

nadiers, plus de soixante éclaireurs… C’est ça qui va nous donner de la besogne, ces jours-icite.

Au milieu de ces propos sensationnels, ils sortirent et, sur le pas de la porte, se séparèrent.

Tandis que La Ronde regagnait son logis, Joseph Lacroix se dirigeait vers le quartier général. La nuit était noire et froide. Un vent venu du nord-ouest, un vent qui avait balayé les cimes glacées des Rocheuses, soufflait par intervalles et faisait gémir les hautes futaies. Quoique bien encapuchonné dans son « capot de couverte », Lacroix pressa le pas. Soudain, vis-à-vis du groupe des maisonnettes de bois, il s’arrêta.

À vingt mètres de lui, dans le carré de lumière projeté sur la neige par une fenêtre éclairée, un homme de petite taille conversait avec un interlocuteur invisible.

Les yeux perçants du chef des éclaireurs semblèrent fouiller l’obscurité où se dissimulait le second personnage :

— Celui-cite est Pitre-le-Loucheux, grommela-t-il… mais, foi d’homme ! on dirait que l’autre est Jean La Ronde…

Au bout d’un instant, il ajouta :

– Eh ! oui… et qui tient un cheval par la bride, encore !… Ah ! ça n’est pas naturel tout ça… Qu’est-ce qui peuvent ben se conter ?… Faut que j’écoute leur « jasette »…

Avec une souplesse et une prudence de véritable Peau-Rouge, l’éclaireur, profitant de l’ombre, gagna, par un détour, le pignon de la bâtisse devant laquelle conversaient les deux hommes. Alors seu-