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Page:Poirier - Les arpents de neige, 1909.djvu/115

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les arpents de neige

En temps de guerre, au reste, la défiance est de règle… Edward, avez-vous lu ?…

— Elle vit ! balbutiait l’interpellé d’une voix étranglée de joie et d’émotion.

— Quoi ! c’est bien elle !

— Elle-même qui m’écrit ! Ils sont à Batoche… Aucun mal… Mais par le ciel ! Charlie, laissez aller ce garçon… C’est un gentleman… Laissez-le, vous dis-je…

— La joie vous rend fou, mon cher, dit Went froidement. Croyez-vous que j’ai envie que ce gaillard me rende la pareille ? Ôtez-lui ce couteau que j’aperçois à sa ceinture et le revolver qui se dissimule dans le « pistolpocket » de son pantalon de cuir… et nous verrons après.

Sans enthousiasme, le lieutenant obéit.

— C’est bien, reprit l’autre en abaissant son arme. Maintenant, nous pouvons nous expliquer amicalement.

— La chose est bien simple, Charlie, dit vivement Simpson. Ma sœur a usé de la complaisance de ce jeune Métis pour me faire passer de ses nouvelles. Oui, continua-t-il en se tournant vers le messager, je suis bien le lieutenant Clamorgan. Et si mon camarade semblait dire le contraire tout à l’heure, c’était simplement parce qu’il cherchait par tous les moyens à confondre un homme que nous prenions pour un espion… Soyez tranquille, nul autre que moi n’est le destinataire de cette lettre : je vous l’affirme sur l’honneur. Et puis, veuillez nous pardonner aussi une défiance bien excusable dans la circonstance.

Went regarda son ami d’un air intrigué et légè-