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Page:Poirier - Les arpents de neige, 1909.djvu/179

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les arpents de neige

Trim regarda Dumont d’un air interrogateur, comme quelqu’un qui comprend mal…

Quant à Pierre La Ronde, il avait, dès les premiers mots, pressenti très graves les révélations du Loucheux. Maintenant, il n’y avait plus le moindre doute : il s’agissait bien de l’absence de Jean un soir. Cette absence dont lui seul avait pénétré le motif, croyait-il… et voici qu’il découvrait qu’un autre en savait sur ce point aussi long que lui… davantage peut-être… Et celui-là s’apprêtait à faire part à Gabriel Dumont du soupçon qu’il avait conçu ! Mais alors Trim et bien d’autres allaient être, avant deux jours, au courant de tout ! Il fallait éviter cela coûte que coûte. Et, pour l’éviter, il n’y avait qu’un moyen : confier tout à Dumont sous le sceau du plus absolu secret : lui dire qu’il avait lui-même tiré sur son frère, et pour quelle raison… Ainsi, il épargnerait au Loucheux une injuste condamnation et à son père une nouvelle douleur…

Ces idées traversèrent en éclair le cerveau de Pierre La Ronde… À peine l’Indien avait-il répondu à la dernière question du chef Métis, que le frère de Jean se tournait vers Trim :

— Cet homme est fou ! dit-il avec force.

Et, d’un ton plus calme :

— Il est encore tout maladif de sa saoulerie… Mais j’avons autre chose à faire qu’à d’ouïr les paroles des fous… pas vrai ?

— D’autant, ajouta-t-il bien vite en s’adressant à Dumont, que ces maudites histouères allaient me faire oublier que j’ai des nouvelles très consé-