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Page:Poirier - Les arpents de neige, 1909.djvu/195

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les arpents de neige

conséquences de l’interrogatoire de Pitre-le-Loucheux. Une violente émotion secoua Jean-Baptiste quand il apprit de son fils que Gabriel Dumont partageait leur secret. Mais, lorsqu’il sut que Louis Riel, le héros révéré de tous les Métis, n’en serait pas instruit, il poussa un soupir de soulagement. Pourtant, qu’allait décider le chef au sujet du coupable ? Lui était-il possible de sévir contre lui pour cause de forfaiture sans que Riel en fût instruit d’une façon ou d’une autre ? Une anxiété ressaisit La Ronde. Il résolut d’aller trouver Dumont et de l’interroger sur ses intentions.

Sur le seuil, il heurta son père qui rentrait. La face couleur de brique du vieux François exprimait la satisfaction la plus vive. Autour de ses yeux noirs et malicieux, mille petites rides se formèrent soudain, et ses lèvres se distendirent en un large sourire :

— Ah ! ah ! s’écria-t-il en langue crise ; le mauvais Indien est en cage. Le Loucheux a voulu voir la couleur de mon sang, mais notre chef est survenu : d’un vigoureux coup, il l’a jeté à terre. Je suis bien content.

À la prière de son fils, le vieux trappeur donna toutes les explications que comportait ce préambule.

Après quelques réflexions échangées de part et d’autre sur cette affaire, Jean-Baptiste s’enquit de Gabriel Dumont.

— Il vient de partir avec des éclaireurs, répondit le vieillard ; il restera, je crois, absent tout le jour.