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Page:Poirier - Les arpents de neige, 1909.djvu/252

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réconciliation et prouesses

Leurs mains se cherchèrent dans l’ombre et s’étreignirent.

— À la vie ! à la mort !

Ils s’élancèrent.

Ce moment marquait le fort de la lutte entre les troupes de la Puissance et les Bois-Brûlés assaillants. Tous les canons tonnaient. La mitrailleuse Gatling tirait avec fureur ses deux cent cinquante coups à la minute… Une intense fumée flottait sur le lieu du combat, noyant les hommes et les choses dans sa brume.

Les deux frères, au milieu des balles des deux partis qui s’égaraient de leur côté, parvinrent sans encombre près de la porte de l’église. Mais, au moment où ils allaient la franchir, un coup de feu éclata à quinze pas d’eux, à peine, trouant le chapeau de Jean d’un projectile.

À travers le brouillard roussâtre qui les enveloppait, l’œil perçant de Pierre découvrit aussitôt la silhouette de l’agresseur. En quelques bonds, il est près de lui : c’est un « Scout » Pied-Noir. Sans doute vient-il d’user sa dernière cartouche, car il lâche sa carabine à répétition et, poussant son cri de guerre, il saisit son revolver. Mais, rapide comme la foudre, la hache du Bois-Brûlé s’abat sur sa tête qu’elle fend jusqu’aux oreilles. L’Indien s’effondre les yeux révulsés, la bouche encore ouverte…

Pierre rejoignit son cadet :

— Vite à l’église ! dit-il.

Sur le seuil, ils s’arrêtèrent.

Un homme était là, au fond, non loin de l’autel.