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Page:Poirier - Les arpents de neige, 1909.djvu/320

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trois irréductibles

avant six ou sept jours s’ils ne se procuraient des chevaux en route. C’était un de leurs soucis ; l’autre, plus grave, était le manque de cartouches. Ils n’en possédaient que huit à eux trois, chiffre probablement insuffisant en cas de fâcheuse rencontre. Quant à leur subsistance, ils comptaient, pour l’assurer, non moins sur les rares fermes métisses qu’ils pouvaient trouver en chemin que sur la découverte d’établissements de colons anglais abandonnés par leurs propriétaires. Ils n’ignoraient pas d’ailleurs que ces ressources leur feraient souvent défaut ; mais ces robustes coureurs de plaines avaient confiance en leur extraordinaire endurance et leur facilité à supporter les privations. Ils s’étaient mis en route immédiatement sans souffler, Pierre La Ronde redoutant la traversée de la rivière par les éclaireurs ennemis et ne se souciant pas d’exposer à nouveau ce drapeau deux fois sauvé par lui et qu’il entendait arborer dans les prochains combats. Les deux premières étapes se firent sans incident. Mais, vers le soir du troisième jour, ils s’étaient arrêtés, à la demande du vieux François, sous un bouquet d’arbres, aux bords de la petite rivière de l’Aigle, lorsque l’Assiniboine signala une troupe de cavaliers dans la direction du Nord-Est.

Un peu inquiets, ils préparaient leurs armes, quand Pierre, qui avait la vue aussi perçante qu’un Indien pur, reconnut des Cris. Ils étaient quatre. L’un d’eux marchait un peu en avant.

— Corne-de-Buffle ! annonça le jeune Métis.

Il ne se trompait pas. Le lieutenant du Grand-