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Page:Poirier - Les arpents de neige, 1909.djvu/358

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l’espoir renaît

cours du jeune homme. C’était Baptiste La Ronde qui quittait sa place et se précipitait vers lui. Le brave Bois-Brûlé avait les larmes aux yeux ; il pressait les mains d’Henry avec une énergie peu commune, en murmurant des mots entrecoupés :

— Ah ! M’sieu le vicomte… merci, merci donc ! Ah ! les Françâs de France !… merci… merci, M’sieu le vicomte !

Jean La Ronde et même le vieil Antoine, tout claudicant, s’étaient levés à leur tour et, à leur tour aussi, ils remerciaient avec effusion leur bienfaiteur.

Dans un coin, la femme et les filles de Baptiste semblaient toutes bouleversées… Quant à Rosalie, plus sensible encore, elle pleurait franchement.

— Ne faut-il pas assurer l’avenir ? reprit Henry en réagissant non sans peine contre le trouble qui le gagnait lui-même. Mon bon ami Jean, avant mon départ, m’avait confié ses peines : il aurait bien voulu épouser la charmante fille que voilà… Mais, quoi ? Quand on n’a pas d’argent aussi… Or, moi je suis riche. Qu’est-ce que ça peut me faire quelques milliers de francs de plus ou de moins ? Aussi, ma foi, je ne trouve pas que j’aie grand mérite à doter Rosalie…

Lorsque l’émotion fort compréhensible soulevée par ces paroles se fut calmée un peu, le Français reprit d’une voix plus grave :

— Non ! voyez-vous, mes amis, il ne faut pas que tant de braves soient tombés sous les balles anglaises en pure perte… Il ne faut pas, vous comprenez, que l’effort de Louis Riel demeure stérile… J’ai parlé du Canada et du nord-ouest, là-