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Page:Poirier - Les arpents de neige, 1909.djvu/373

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les arpents de neige

Le tour du propriétaire achevé, ils revinrent tous au « log-hut », en conversant avec animation.

Assise devant sa porte dans l’ombre tiède portée par la maison de bois, Rosalie, en vraie demi-indienne, mettait la dernière main à une paire de mocassins destinés à son mari… Près d’elle, dans une couverture, un bébé d’une dizaine de mois s’agitait et se roulait, nu comme un petit sauvage.

— Celui-ci est mon filleul, Philippe, dit gaiement Vallonges en conduisant son ami devant l’enfant. C’est le jeune Henry La Ronde.

— Élevé à la mode des camps indiens, à ce que je vois… observa Dussereaux.

— Tout à fait, M’sieu, répondit Jean en souriant. Nous avons tous été « éduqués » de même à la maison, et vous voyez qu’on ne s’en porte pas plus mal.

Le Français jeta un regard rapide sur l’homme magnifique au teint ambré, au corps souple et fort qu’il avait devant lui.

— En effet ! fit-il simplement.

C’était l’heure du thé.

Ils le prirent dehors, en face de la Saskatchewan, de la plaine verdoyante qui déployait sous leurs yeux ses splendeurs printanières et des collines boisées de l’autre berge illuminées par le soleil déclinant…

Ils se taisaient.

Henry, le premier, rompit le silence :

— Mes amis, nous sommes au 11 mai 1887.

Jean tressaillit.

— J’y pensais ! dit le P. Léonard.