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les arpents de neige

Le temps était redevenu sombre et menaçant. Une brise terrible soufflait emportant des flocons de neige épars qui venaient s’accrocher et fondre n’importe où : sur les fourgons, le dos des hommes, les croupes des chevaux.

Un peu avant la nuit, on parvint à l’une des cabanes solitaires qui marquaient les relais de la diligence primitive, chargée en temps normal du service entre Qu’Appelle et Batoche.

La colonne s’y arrêta, et l’on établit le campement.

Au milieu du cercle formé par les fourgons disposés en enceinte, roue contre roue, à l’américaine, on dressa les tentes. Des pelotons d’hommes furent envoyés au bois et à l’eau, et bientôt d’épaisses fumées s’élevèrent, emportées et dissoutes par le vent, à mesure qu’elles montaient dans l’air glacial.

Assis sur un paquet de couvertures, Edward Simpson écrivait fiévreusement à la lueur incertaine d’une lanterne. Il faisait part au farmer Hughes Clamorgan de ses inquiétudes, de ses anxiétés même, en apprenant le soulèvement des Indiens Cris et Stonies. Il essayait de le convaincre de la gravité de la rébellion, du danger qu’il y aurait à tenter de défendre son établissement, et le suppliait de se réfugier au plus tôt avec sa fille, soit au Fort-Pitt, soit à Prince-Albert, sous la protection plus immédiate des forces canadiennes. Il exprimait aussi l’espoir que l’énergie et l’habileté du général Middleton ne tarderaient pas à rétablir l’ordre sur la Saskatchewan, en sorte que son union