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l’attaque du fort-pitt

Vingt-cinq milles séparaient le défrichement du poste militaire. Élevé sur le bord de la rivière, il était, comme tous les forts de traite, composé d’un groupe de constructions de bois solidement défendu, du côté de la prairie, par des fossés avec d’épais revêtements de terre et des palissades de cinq à six mètres de hauteur ; de tels obstacles étaient suffisants pour arrêter des Peaux-Rouges armés seulement de carabines, de couteaux et de haches, et trente hommes de la police montée bien armés et résolus étant préposés à la garde de ce poste, on pouvait espérer trouver une parfaite sécurité dans son enceinte.

Durant le trajet, le blessé, qui avait repris quelque force, compléta ses renseignements : la révolte des Indiens du Grand-Ours avait été absolument soudaine. Avec une incroyable rapidité, ils avaient pillé les magasins de la Compagnie et massacré ceux des blancs qui tentaient la moindre résistance. Les Pères Oblats Fafard et Marchand, ayant voulu intervenir et prêcher l’apaisement, avaient été fusillés sur-le-champ ; le reste des colons, dont quelques femmes, fait prisonnier par les sauvages, était entraîné parmi eux dans leur marche sur Fort-Pitt…

En dépit de ces nouvelles émouvantes, la route parut longue à miss Elsie, non qu’elle fût incommodée le moins du monde par les soubresauts que le terrain assez inégal des plaines imposait au buggy ; elle était trop accoutumée aux promenades en prairie dans ce véhicule un peu primitif pour y prendre garde. Mais, si peu impressionnable qu’elle fût d’habitude, les événements des deux