Page:Poirier - Les arpents de neige, 1909.djvu/63

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
48
les arpents de neige

resta longtemps étendu dans un état de prostration qui ne lui permit pas de se rendre compte de sa situation. Peu à peu cependant, ses idées devinrent plus nettes ; il aperçut un homme accroupi non loin de lui ; il l’avait pris pour un Peau-Rouge d’abord, mais l’autre, en peu de mots, l’avait rassuré.

— Et depuis ce temps, achevait Hughes Clamorgan, nous nous sommes surtout occupés de vous, Elsie. En sorte que j’ignore encore comment ce garçon nous a soustraits aux Indiens…

Et, ce disant, le fermier se tournait vers le jeune homme assis à l’écart.

Mais ce dernier ne parut nullement désireux de répondre à cette question indirecte. Il se contenta de désigner du doigt à ses compagnons une légère fumée qui s’élevait à une certaine distance au-dessus des buissons, sur la rive opposée de la Saskatchewan.

— Là-bas est le camp des Cris, dit-il. Voici le jour qui vient. Il ne faudra pas trop s’attarder ici.

Et, fixant sur la jeune fille ses yeux bruns, il continua :

— Si vous ne vous sentez pas trop fatiguée, miss, vous quitterez même le plus tôt possible ces lieux.

Miss Clamorgan affirma qu’elle se trouvait maintenant tout à fait remise et qu’elle ne demandait qu’à s’éloigner. Le farmer approuva aussi la proposition. Toutefois, il exprima avec un soupir son regret d’être contraint de partir l’estomac creux,