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de charybde en scylla

et, questionnée par lui, sa fille avoua se trouver dans les mêmes dispositions.

L’étranger prit alors la parole :

– J’ai ce qu’il vous faut. Suivez-moi seulement, et vous serez satisfaits.

Très intrigués, les deux Anglais gagnèrent, à la suite de leur guide, un bouquet de trembles.

Derrière les halliers, une jument alezane, un peu maigre, mais d’apparence très vigoureuse, mordillait le tronc auquel on l’avait attachée.

Au troussequin élevé de la selle étaient fixés, outre une couverture roulée, une gourde et un petit sac de peau que gonflait son contenu.

Le jeune homme prit l’une et l’autre :

— Voilà de l’eau et du rhum, dit-il en élevant la gourde. Quant à ceci, c’est du « pemmican ».

Lorsque Hughes Clamorgan et sa fille se furent désaltérés à leur gré et qu’ils eurent absorbé leur content de la grossière mais fortifiante nourriture, le possesseur de la jument, ayant détaché sa monture, se tourna vers eux :

— Le moment de nous séparer est venu, dit-il. Le mieux que vous ayez à faire est de gagner au plus tôt Battleford. Les abords maintenant en sont libres. Le colonel Otter y amène des renforts ; vous n’aurez rien à y craindre des Indiens.

— Mais, objecta le farmer, c’est qu’il y a fort loin d’ici Battleford, et…

Il y a environ quatre-vingt-huit milles, reprit l’autre sans s’émouvoir. Mais voici une jument qui vous mènera au but sans encombre… Elle est très douce, très…