Page:Poirier de Narçay - La Bossue.djvu/153

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sance relative, et il en est de toutes les classes, laissent les autres courir soit après leurs rêves, soit après la fortune.

Ils ne se meuvent qu’autant qu’ils y sont contraints par la nécessité de manger et de boire, ou les exigences instinctives de leurs sens, sortes de statues inférieures aux véritables parce qu’elles sont animées.

Et plus les sociétés se civiliseront, plus les inerties volontaires croîtront en nombre, résultantes de la compréhension de luttes impossibles.

— Ils sont trop, oui, trop de sots et d’indélicats, trop de faibles, trop d’inutiles protégés par des lois destinées à accroître la collectivité et à détruire l’individu sans lequel la collectivité ne saurait exister. Affreux non-sens ; mais tout est non-sens dans les civilisations en tant que bloc ; les détails sont supportables et souffrent l’explication, mais l’ensemble constitue une négation.

L’homme d’ailleurs ne peut créer un ensemble, car l’ensemble c’est le tout qui comprend la terre, les arbres, les animaux, l’eau, le feu, les nuages, les soleils, la lune, les étoiles, les planètes et l’éther où tous les mondes se meuvent.

Aussi ce qui édifie l’influence de ces antiques statues de saints attirants les foules, c’est, en dehors des légendes, le besoin d’être secouru par une puissance intangible, incalculable humainement parlant, une puissance capable de diriger dans la bonne voie l’homme libre, si libre qu’il est en train d’en mourir.

Les fées bienfaisantes des contes, les magiciens, les sorciers, les somnambules, ne sont que la conséquence de la faiblesse d’action de l’homme devant les forces naturelles ou celles coalisées de ses pareils.

Aussi, parmi ces faibles, il en est, suivant l’éducation et le genre de cerveau, qui préfèrent comme appui Dieu, les saints, les sorciers et un gouvernement fort ; d’autres aiment mieux l’anarchie comme pouvoir, pouvoir étrange, futur dispensateur d’une liberté factice détruite à chaque instant par celle du voisin, état social défini par quelques-uns dans cette formule : « Ni Dieu, ni maître », formule presque impossible