Page:Ponson du Terrail - Le Bal des victimes.djvu/12

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

leur billet d’entrée, Marion avait vu briller un regard noir et profond, noir comme une nuit d’été, étincelant comme une étoile des cieux d’Orient.

Ce regard se fixait sur elle et Marion, toute tremblante, demeura immobile.

Alors un homme s’approcha.

Il n’était point vêtu comme les beaux du jour, il n’avait ni les boucles d’oreilles, ni la cravate monstrueuse, ni le gilet à paillettes, ni les bas gorge de pigeon des incroyables.

Chaussé d’une fine botte à revers, enveloppé dans un carrick gris de fer, coiffé d’un chapeau à bords rabattus, il ressemblait beaucoup plus à un étranger, Anglais ou Allemand, qu’à un Parisien.

— Vous ! fit Marion avec stupeur.

— Tu sais bien, dit l’inconnu à voix basse, que je ne t’apparais que les jours où j’ai besoin de toi.

— C’est juste, monseigneur…

— Chut ! écoute-moi…

— Parlez…

— Il faut que tu sois à Grosbois ce soir.

— Grosbois ? dit Marion, mais c’est à quatre lieues de Paris, et il est sept heures bientôt. Comment y aller ?

— Tu n’as plus que ce bouquet ?

— C’est mon dernier.

— Eh bien ! garde-le… quelque prix qu’on t’en offre, réponds qu’il est vendu.

— Qu’en ferai-je donc ?

— Tu l’offriras à une femme qui va passer ici, dans quelques minutes, dans un carrosse à quatre chevaux