Page:Ponson du Terrail - Le Bal des victimes.djvu/156

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Les valets et les pâtres couchaient dans un troisième corps de logis.

Suivant la paisible habitude des gens de la campagne, tous étaient déjà au lit, et il n’y avait plus sur pied dans la ferme que Brulé, ses hôtes, sa femme et son fils quand ces derniers reparurent dans la cuisine.

Le Bouquin s’en était allé.

Où ? bien malin eut été celui qui eût pu le dire.

La neige qui tombait en gros flocons n’arrêtait pas le maudit petit braconnier.

Maître Brulé causait toujours.

Il était descendu à sa cave et en avait remonté une bouteille de vieux vin de la chaînette, un cru fameux de l’Auxerrois.

Henri et l’officier buvaient sec.

Le vin déliait la langue de Brulé.

— Ma foi ! disait-il, les incendiaires peuvent venir maintenant ; ils n’auront pas cette bouteille.

Et il acheva d’emplir son verre.

— Ah ! dit Henri, laisse donc un peu les incendiaires de côté, mon pauvre Brulé !

— Vous en avez donc bien peur, vous ? dit le capitaine qui continuait à observer Brulé.

— Ah ! dam, répondit le fermier, savez-vous bien Que j’ai toutes mes récoltes en grange ?

— Rassure-toi, dit Henri ; tu es un trop brave homme pour qu’on songe à te faire du mal.

— Le fermier de la Fringale aussi était un brave homme, soupira Brulé. Ça n’empêche pas qu’il a été brûlé… incendié.