Page:Ponson du Terrail - Le Bal des victimes.djvu/207

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— Henri ! répéta-t-il plus haut.

Même silence !

Le capitaine se décida à ouvrir la porte, et il pénétra dans la chambre du comte.

La chambre était vide et le lit non foulé.

— Ah ! bon ! pensa le capitaine, je devine. Il y a ici dans quelque coin de la ferme une belle fille, sans doute, avec qui Henri cause au clair de la lune.

Et il se recoucha tranquillement, persuadé que c’était Henri qui avait fait tout le tapage qu’il avait entendu.

Mais cette fois, au lieu de dormir, le capitaine se prit à songer.

Une chose l’étonnait outre-mesure, c’était l’indifférence et presque l’incrédulité de son ami le comte Henri, à l’endroit des incendiaires.

Pourquoi ?

Henri était royaliste ardent, et la police du Directoire avait prétendu que c’étaient les royalistes qui faisaient mettre le feu. Ensuite, le capitaine songea que chaque nuit, Henri quittait les Roches.

Où allait-il ?

C’était un mystère.

Une pensée bizarre traversa alors l’esprit du capitaine :

— Si Henri était à la tête des incendiaires ? se dit-il.

Et cette pensée, qu’il repoussa d’abord avec indignation, s’ancra peu à peu dans sa tête et y grandit.

Et s’il allait mettre le feu à la ferme, se dit-il encore, s’il n’avait quitté son lit que pour cela ?…

Cette dernière réflexion étreignit l’esprit du capitaine et le mit à la torture pendant quelques minutes.