Page:Ponson du Terrail - Le Bal des victimes.djvu/21

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— Comment ! s’écria madame Tallien au comble de la surprise, j’ai dans ma voiture un coffre qui vous appartient ?

— Oui, madame !

— Voilà qui est au moins bizarre…

— Non ; je l’ai envoyé hier soir à votre hôtel, et votre valet de chambre s’est chargé de le placer dans le caisson.

— Mais ce coffre que renferme-t-il ?

— Quelques hardes dont nous avons besoin cette nuit.

— Et c’est là le service que vous réclamiez de moi ? mon cher baron.

— Attendez, madame… Vous avez amené Marion, la jolie bouquetière ?

— La voilà, comme vous voyez…

— Ceci est la deuxième partie du service dont nous parlons. Vous présenterez Marion, que tout le monde connaît, dans les splendides salons de Grosbois, où le fastueux citoyen Barras se figure aisément qu’il est à peu près roi de France.

Madame Tallien sourit.

— Après ? dit-elle.

— Autrefois, dans un vrai salon, on n’eût osé produire Marion la bouquetière, mais à présent… au milieu de cette société bizarre et bariolée, qu’on nomme la cour du Directoire… au milieu de ce monde qui est une agrégation étrange des épaves de l’ancien régime et de l’écume du nouveau, on trouvera charmant de voir apparaître cette délicieuse fille en jupons rouges, qui refuse les diamants qu’on lui offre et veut demeurer bouquetière.

— En effet, dit madame Tallien, je puis vous assurer qu’elle sera bien accueillie. On me trouvera même adorable