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MARIE-THÉRÈSE IMPÉRATRICE


encore susceptible de ces bons mouvements qui peuvent faire illusion sur un fond de libertinage, d’ardeur sensuelle et d’impitoyable égoïsme.

Et quel cortège ! Remarquez d’abord deux noms qui expliqueraient peut-être deux influences contradictoires, continuées dans la famille de Broglie en un temps plus voisin du nôtre : le maréchal, antique modèle de bravoure chevaleresque et de fidélité royaliste, et d’Argenson, précurseur du libéralisme moderne, philosophe, utopiste, enclin à méditer des programmes de régénération sociale, qui lui semblent propres à consolider la monarchie ; l’aventureux maréchal de Belle-Isle ; Maurice de Saxe, le héros, le triomphateur, à qui il n’a manqué qu’un plus exact équilibre de ses facultés puissantes pour occuper un rang encore plus haut parmi les portraits du siècle ; Richelieu, le mauvais génie de Louis XV, couvrant d’un vernis d’exquise élégance la corruption la plus raffinée, actif collaborateur des Encyclopédistes dans leur travail de dissolution morale ; guettant, chez Louis XV, le réveil des mauvaises passions pour les envenimer et les rendre incurables ; Méphistophélès chaussant son pied fourchu de souliers à talon ronge, idole des philosophes qu’enchante son scepticisme, et des alcôves où la faiblesse féminine se laisse griser par les parfums capiteux de sa trop savante galanterie, tout ensemble flatteur et flatté, flatteur du roi, dont il connaît le fort et surtout le faible, et qu’il fait descendre, sur une pente fleurie, de Châteauroux à Pompadour et de Pompadour à