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de Nantes, avait pénétré jusqu’aux abords d’Angers (844). Nominoé, repoussé du Maine, rentre avec lui dans le Poitou, saccage St-Florent, bat Charles le Chauve près Ballon (845) et se retourne dès lors contre Lambert. Ce dernier se réfugie à Craon, qui en ce temps dépendait du Nantais[1] édifie un château fort sur l’Oudon, — à Châtelais sans doute, — et commande le pays jusqu’à la Maine et la Loire[2], ou même depuis la Seine, à titre de duc, au nom du roi. Mais de nouveau, avec son assistance, Nominoé envahit l’Anjou, occupe Angers (849), pousse jusqu’à Vendôme et y meurt (851), — pendant que Lambert, surpris au retour par le comte du Maine, périt dans une embuscade (1er mai 852). Son corps fut transporté à Savennières et le roi fit mettre à mort son meurtrier. Déjà Charles le Chauve avait obtenu par traité la retraite des Bretons en concédant à Erispoé, leur chef, toute la rive droite de la Loire depuis l’embouchure de la Maine, ou même, s’il fallait en croire un chroniqueur, depuis le milieu du pont d’Angers[3]. — L’Anjou, avec le Maine, la Touraine, le pays de Seez et le Corbonais, avaient formé une des dix généralités, missatica créées par Louis le Débonnaire et dès l’année qui suit cette confusion de guerres (853), trois missi dont l’évêque Dodon et Robert le Fort, y viennent fonctionner avec mandat spécial du roi. Dans l’année même les Normands, qui avaient depuis dix ans fait leur apparition à Nantes, remontent pour la première fois la Loire, saccagent les deux rives, pillent Angers et la Touraine. Ils ne se retirent qu’en 854 pour revenir hiverner en 856, de nouveau en 862 et presque chaque année passant et repassant par le pays, poussent en 866 jusqu’au Mans et écrasent au retour la petite armée de Robert le Fort. Expulsés en 872 d’Angers[4] et retirés dans les îles de la Loire, ils reviennent rançonner la Touraine en 877, se font tailler en pièces en 879 près Saumur dans la vallée de la Vienne, et depuis vingt ans semblaient disparus, quand dans une dernière visite leurs barques en 903 portent l’alarme jusqu’à la haute Loire[5].

Comtes héréditairesDans ce désordre le gouvernement de l’Anjou restait un simple commandement militaire subordonné aux nécessités de la politique ou de la guerre. A Robert, qu’un moment en 865 le fils du roi, Louis, semble avoir remplacé, avaient succédé dès 866, comme comte de la Touraine et de l’Anjou, Hugues l’Abbé, et à sa mort (885) le fils de Robert, Eudes, bientôt après roi de France. Leurs pouvoirs, en grandissant, durent se déléguer pour partie, comme dans l’origine, à quelque fidèle. C’est sous le simple titre de vicomte, qu’il faut désigner le légendaire Ingelger et reconnaître d’abord son fils Foulques, qui va s’approprier bientôt celui de comte et en léguer l’héritage à sa race, étrangère jusqu’alors au pays. Des Torquat, des Tertulfe, de cette famille poétique de forestiers Bretons, que racontent les chroniques, l’histoire sérieuse dément facilement la tradition imaginaire, comme les faits ont suffisamment réfuté la division de l’Anjou en deux comtés. Mais dès avant le milieu du Xe siècle, le fief est véritablement constitué et

  1. Tunc temporis territorii Nannetici vicum, D. Lobin, I, 41.
  2. Qui ducatum tenebat inter Sequanam et Ligerim.
  3. Dominante Erispoe totam Britaniam et usque ad Medanum flumen, D. Lobineau, II, 55 et 367. — Dominante Salomone… usque Medanum flumen, Cartul. de Redon, ch. 72. — La Chronique de St-Brieuc dit : Usque ad medium pontia urbis Andegavœ.
  4. V. t. I. p. 37 et t. III, p. 230.
  5. Mabille, Invas. Normandes dans la Biblioth. de l’Ec. des Ch. 1869.